La réforme légale allemande du 19 mai 2013 sur le droit de l'autorité parentale

La loi portant réforme du droit de l'autorité parentale concernant les enfants de parents non mariés entre eux est entrée en vigueur le 19 mai 2013. Elle vient consacrer la règle posée par la Cour constitutionnelle fédérale dans sa décision du 21 juillet 2010 qui avait ouvert aux pères non mariés la possibilité d'obtenir l'autorité parentale conjointe ou exclusive contre la volonté de la mère.
La dimension politique du sujet a abouti à un compromis sous la forme d'un nouveau modèle qui continue toutefois à isoler l'Allemagne dans ce domaine juridique en comparaison à ses voisins européens, notamment la France.

La nouvelle situation légale

Le nouveau droit concerne les enfants déjà nés au moment de l'entrée en vigueur de la loi et s'applique aux procédures en cours devant les tribunaux de première instance et les cours régionales supérieures.

Si les parents non mariés n'effectuent aucune déclaration qu'ils entendent exercer ensemble l'autorité parentale, la mère obtient l'autorité parentale exclusive lorsqu'aucune autre règle légale (par exemple, si la mère est mineure) ou une décision judiciaire ne s'y opposent. En dehors du mariage, l'autorité parentale conjointe naît en effet de la déclaration commune des parents ou bien sur le fondement d'une décision judiciaire.

La règle légale sur la dévolution de l'autorité parentale conjointe par déclaration des deux parents reste donc inchangée. Comme précédemment, les parents ne peuvent pas limiter l'exercice de l'autorité parentale à certains domaines.

Cette déclaration commune doit faire l'objet d'un acte authentique établi soit par le notaire soit par le service de protection de la jeunesse (Jugendamt) lequel tient le registre relatif à l'exercice de l'autorité parentale. Cette authentification peut également être remplacée par un accord des parents passé devant le tribunal.

En cas de retrait total ou partiel de l'autorité parentale à la mère, le père ne pourra l'obtenir que par décision du juge.

Deux procédures judiciaires sont prévues : une simplifiée et une régulière plus longue.

Procédure simplifiée

Dans le cadre de la procédure simplifiée, le juge accorde l'autorité parentale conjointe si cette attribution ne contrevient pas au bien-être de l'enfant. Il doit en effet seulement procéder à un examen négatif et en l'absence de raison faisant obstacle à l'exercice commun de l'autorité parentale, donner droit à la demande. En revanche, s'il constate que les parents ne s'entendent pas et ne coopèrent pas un minimum, il pourra refuser de donner son approbation.

Les parents doivent en effet s'efforcer d'entretenir des relations cordiales et objectives pour le bien-être de l'enfant et peuvent être tenus par le juge de prendre conseil auprès d'institutions spéciales de protection de la famille et de l'enfance pour mettre fin à leurs conflites persistant.

Présomption légale

Lorsque l'autre parent ne prend pas position à la demande d'obtention de l'autorité parentale conjointe ou qu'aucune raison visible ne s'y oppose, il est légalement présumé que l'exercice commun de l'autorité parentale n'est pas contraire au bien-être de l'enfant. Le législateur considère en effet que le parent qui aurait des raisons importantes à faire valoir concernant le bien-être de l'enfant les porterait à la connaissance du tribunal alors que le silence laisse en principe supposer que de telles raisons n'existent pas.

La présomption légale peut également s'appliquer lorsque les arguments apportés pour s'opposer à la dévolution de l'autorité parentale conjointe sont sans conséquence sur le bien-être de l'enfant. Sont par exemples sans incidence les arguments suivants :

La présomption légale ne s'applique pas lorsque des raisons s'opposant à l'autorité parentale conjointe sont manifestes ou déjà connues, telles que l'absence de relations sociales entre les parents ou l'existence de violence conjugale.

Déroulement de la procédure

Les titulaires de la demande sont le père dont la paternité est reconnue et la mère de l'enfant. Le père biologique ou supposé tel ainsi que le père « social » ne sont pas habilités à déposer une demande. Ainsi, si la mère refuse de donner son accord à la reconnaissance de paternité notamment prénatale, le père devra au préalable introduire une procédure en reconnaissance de paternité.

Dans la procédure simplifiée, le tribunal de famille peut donner suite à la demande sans avoir préalablement entendu ni le Jugendamt qui n'est pas partie à la procédure ni personnellement les parents. La décision est en effet une procédure écrite. En revanche, l'enfant doit être personnellement entendu.
Chaque partie qui conserve son droit fondamental d'être entendu par le juge doit en faire la demande expresse dans un court délai. Les parties peuvent également faire appel de la décision du juge dans le mois de la décision. Le Jugendamt qui n'est pas partie à la procédure ne peut pas faire appel de la décision laquelle lui est communiquée uniquement pour la mise à jour du registre qu'il tient sur l'autorité parentale.

Procédure régulière

Lorsque le juge a connaissance de raisons pouvant s'opposer à l'attribution de l'autorité parentale conjointe, il doit appliquer la procédure régulière. Dans cette procédure, les parents sont entendus personnellement ainsi que le Jugendamt, dans le mois suivant la connaissance des raisons. En revanche, dans les 6 semaines suivant la naissance de l'enfant, aucune procédure, simplifiée ou régulière, ne peut être introduite.

Dans la procédure régulière, le père peut obtenir l'exercice exclusif de l'autorité parentale de deux façons :

Remarques finales

Le juge allemand aux affaires familiales n'a plus à constater si l'attribution de l'autorité parentale conjointe est conforme à l'intérêt de l'enfant. Il doit se contenter d'un examen négatif, autrement dit examiner s'il n'existe pas de raisons manifestes sérieuses pouvant y faire obstacle.
La mère ne peut plus s'y opposer dès lors qu'elle ne présente pas de raisons manifestement contraires au bien-être de l'enfant. Les obstacles que les pères avaient auparavant à surmonter pour obtenir l'exercice commun de l'autorité parentale sont ainsi levés. Toutefois, compte tenu des imperfections de la réforme, il n'est pas exclu que la pratique révèle ses lacunes au détriment encore une fois des droits des pères à l'égard de leurs enfants.

Auteur: Maître Fleur Angot


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